Le travail à la peine – par Guy Bottinelli




Il est difficile de faire une présentation objective de la situation de l’emploi : une chose est certaine , c’est qu’après avoir entendu dire et redire que les créations d’emplois seraient le fruit d’une croissance retrouvée, on s’aperçoit que même lorsqu’elle pointe le nez, le chômage continue sa lente hausse. Avant d’en venir à l’avenir incertain de l’emploi salarié, essayons de diagnostiquer son état de santé.

Pour s’en tenir aux grosses structures on peut lister ces disparitions d’emplois que l’Expansion a recensées depuis Août 2014 (net d’embauches). On s’aperçoit que de nombreux grands secteurs sont touchés ;

  • Arcole Industrie (MORY Global : transports)  2210
  • PSA  1.388
  • VIVARTE (chaussures, habillement) 1.150
  • Groupe RAPP (ameublement)  1017
  • THALES  610
  • IKEA  584
  • Labo   FABRE  551
  • AIR FRANCE  532
  • etc…

Plus récemment on a appris qu’ AREVA prévoit de supprimer entre 3000 et 4000 postes avant 2017 , que VOLVO (propriétaire des camions Renault –trucks, compte réduire ses effectifs en France, etc …. Je cite ces noms, relativement connus, mais je n’oublie pas ce qui se passe dans la France profonde. A s’en tenir à une telle liste, on s’étonne que le chômage n’ait augmenté que de 0,4 % en Avril, mais il n’est pas fait état de multiples petites créations d’emplois, ni de la sortie de Pôle-Emploi de ceux qui se lancent dans l’auto-entreprenariat.

Dans cette situation comment réagissent les partenaires sociaux. Les patrons sont en colère contre le maquis règlementaire et les contraintes sociales, et depuis le succès de leur manif. du 1er Décembre , on voit fleurir des groupes de protestations aux noms évocateurs : les Pigeons, les Poussins, les Plumés, ce qui oblige le MEDEF à calmer l’ardeur de ceux qui proposent des actions illégales, comme le refus de payer l’impôt. Toutefois comme la variété des fonctions patronales est aussi étendue que l’espèce humaine, on peut aussi noter la rébellion de certains actionnaires de grandes sociétés, lorsque la rémunération des PDG n’est pas à la hauteur des performances (Celui de Renault/Nissan a  touché 14 millions d’euros  dans l’année). Du côté des syndicats de salariés, la division perdure avec un 1er Mai on ne peut plus écartelé : la CFDT a innové en organisant une journée festive pour  5.000 jeunes salariés et chômeurs avec concert et débats. De son côté, Bernard Thibault, ancien S. Gl de la   CGT déclare qu’il y a trop de syndicats en France : il est vrai qu’il est maintenant au BIT, à Genève, d’où il peut mieux comparer avec l’ensemble des syndicats mondiaux. On ne s’étonnera pas que revienne à la surface la création d’avantages spécifiques pour les membres d’une organisation syndicale (en Allemagne, en Suède, en Belgique), alors que chez nous tous les salariés sont également  couverts par un accord signé.

Mais qu’en est-il de l’avenir du travail salarié auquel les trois quarts des Français sont habitués depuis le début de l’ère industrielle (19ème siècle) ? Un récent rapport de l’ OIT (Organisation Internationale du Travail) indique que la moitié des travailleurs de par le monde ne correspondent plus au modèle occidental, qu’on peut caractériser par un système de protection sociale lié à une subordination professionnelle. En somme allons-nous vers une fin progressive du salariat , au bénéfice d’une indépendance du travailleur, qui devra assumer désormais la recherche d’un emploi et  les diverses formes d’assurances de son choix ? En France, un million d’auto-entrepreneurs ont choisi cette voie, avec des conditions qui évolueront vers l’artisanat traditionnel, puis , au mieux, vers  une des   2,7 millions de petites entreprises (sur 2,9 millions en tout) qui constituent le tissu social de notre pays. C’est la première brique de l’évolution annoncée.

On voit aujourd’hui fleurir ces multiples tâches , dans le monde du commerce en ligne, des transports, de la livraison à domicile, du service informatique ou aux personnes, y compris des bricolages proches du troc, comme cette entreprise de distribution qui embauche un personnel temporaire, qui se paye (si l’on peut dire !) en achetant à prix réduit les produits de la maison ! Toutes ces activités étant bien entendu sous la seule responsabilité du contractant

Au point où nous en sommes, méditons la fable « Le Loup et le Chien » de La Fontaine, un de nos grands sociologues

Guy  Bottinelli     CA de Mirly-Sol       21  Mai  2015

 

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Cet article a été actualisé le : 25 novembre 2018

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